« Ainsi je t’ai vu naître il y a longtemps, te débattant comme un diable pour sortir d’un œuf trop dur pour toi. J’ai vu tes frères et tes sœurs se défaire de leur coquille avec aisance, mais toi… Toi tu étais faible et fragile, tremblant sous l’effort, criant de rage. On dit que les dragons doivent naître seuls, pour prouver leur force. La petite fille que j’étais l’a refusé, et t’a libéré. J’ai pris soin de toi et, depuis ce jour, tu m’as accompagné.
Mon compagnon, mon ami… Je me plonge dans ces souvenirs avec le cœur lourd, alors que ton souffle s’amenuise. Reste avec moi encore un peu, je sais que tu n’as plus la force d’ouvrir les yeux mais je vais te décrire cette terre que tu aimais tant admirer d’en haut. Il fait sombre ici, les arbres masquent la lumière de l’aube et étouffent les échos de la bataille qui se termine. Tout semble paisible ici, au milieu des ruines. Le soleil que tu vas bientôt rejoindre pose ses rayons sur les tours de la ville, c’est si beau. J’aurais aimé voler sur ton dos encore un peu, parcourir ce monde mais il est trop tard. Sache que mes pensées se tourneront vers toi à chaque lever de jour pour le reste de ma vie, j’en fait le serment.
… Va maintenant, va rejoindre le feu et les tempêtes qui t’ont donné le jour, va rejoindre l’âme de ce monde. Je t’aime mon ami. Bon voyage. »
